Il ne fallut pas longtemps avant que Guan Feng réalise tous les plats. Cillin comprit soudain pourquoi tout le monde avait l’air de se diriger vers la potence alors qu’il fixait la table pleine de plats.

Couleur, goût et odeur. Les plats cuisinés par Guan Feng n’avaient pas l’air bons ni ne sentaient bon, et à en juger par les visages de ses frères et sœurs aînés, il comprenait que le goût pourrait en fait être pire que les deux autres.

Le quatuor s’assit autour de la table et fixa du regard les assiettes devant chacun d’eux. Guan Feng ajouta ensuite ce qui ressemblait à une grosse tache de boue dans leurs assiettes.

Cillin jeta un coup d’œil oblique à Goryeo et demanda sans un mot : Qu’est-ce que c’est que cette boue verdâtre qui ressemble à une bouse ?

Goryeo lui fit un signe du regard signifiant ‘t’es tout seul’ et baissa les yeux tout comme Pistura et Fu Qingqing, permettant à Guan Feng d’ajouter des trucs dans leurs assiettes à sa guise.

Le chat gris avait aussi sa propre assiette. Son contenu était exactement le même que celle de Cillin et des autres.

Le chat gris s’accroupit d’une position surélevée et regarda la pile de choses à l’intérieur de son assiette. Il retint son envie de lécher la nourriture et de tester son goût après avoir vu que personne n’avait encore commencé.

Après que Guan Feng eut finalement fini de mettre de la nourriture dans les assiettes de tout le monde, il s’assit et frappa dans ses mains. « Très bien, aujourd’hui, nous accueillons Cillin parmi nous, et cela fait un moment que nous n’avons pas eu de réunion ! »

La bouche imaginaire de Goryeo, Pistura et Fu Qingqing se contracta : nous nous sommes réunis il y a tout juste trente jours ! Certains professeurs sont tout à fait d’accord pour ne pas rencontrer leurs élèves pendant des centaines de jours !

« D’accord, je ne perdrai plus de temps. Commençons. Cillin, c’est la première fois que tu manges ma nourriture, alors assure-toi de la savourer, d’accord ? Ces repas nutritifs sont incomparables à ces repas à l’extérieur. Cette nourriture extérieure est de la pure ordure.

Guan Feng prit les devants et mangea le premier. Goryeo et les autres inspirèrent également profondément avant de se jeter à l’eau. Le visage de Pistura était vert alors qu’il fourrait machinalement de la nourriture dans sa bouche. Une veine palpitait au centre du front de Fu Qingqing, mais elle gardait son expression parfaitement vide.

Cillin comprit parfaitement leurs sentiments au moment où il mit la première cuillerée dans sa bouche. Guan Feng avait raison, c’était incomparable à la nourriture-ordure de l’extérieur parce que cette nourriture induisait au moins l’appétit. La seule chose qui était induite par cette ‘nourriture nutritive d’amour’ était de vomir.

Cillin se força à endurer l’inconfort. Si Goryeo et les autres pouvaient s’y habituer, il le pourrait. Et donc il s’hypnotisa et fourra mécaniquement de la nourriture dans sa bouche.

Dans leur tête, ils criaient : ce n’est pas que nous ne voulons pas manger votre nourriture, nos tripes ne peuvent tout simplement pas le supporter !

Quant au chat gris… il avalait son repas comme s’il n’y avait pas de lendemain !

« Professeur Guan, c’est le meilleur déjeuner que j’ai jamais mangé de ma vie ! »

…Tousse, tousse, tousse…

En étouffant, Goryeo dut boire le verre de jus de melon amer pour s’éclaircir la gorge. Son visage avait l’air déformé.

Pistura s’était également étouffé avec sa nourriture. Fu Qingqing regarda le chat gris avec des yeux écarquillés comme des soucoupes et remplis d’incrédulité.

Le meilleur déjeuner de ta vie ?

Tu t’entraînes à la diaphonie ou quelque chose comme ça ?!

Es-tu sûr de ne pas cirer les pompes du professeur Guan pour qu’il oublie le péché que tu as commis contre les poissons à l’intérieur de l’aquarium ?!

Après avoir confirmé que le chat gris ne plaisantait pas, Guan Feng rit et répondit : « Tu as le meilleur goût, Wheeze, contrairement à ces quatre petits ! »

« Ouais, je sais, n’est-ce pas ! » Acquiesça le chat gris.

Comme si tu l’avais, bon sang !

Guan Feng n’aimait pas parler quand il prenait son repas. Goryeo et les autres n’aimaient pas non plus parler pendant le repas car cela briserait le processus d’engourdissement de faire passer la nourriture dans la gorge.

Cillin avait l’impression d’avoir mené une bataille acharnée après avoir finalement fini toute la nourriture. Cela étant dit, Cillin découvrit rapidement que ce que Guan Feng leur avait dit était en fait réel. Le repas nutritif était extrêmement bénéfique pour le corps humain, un fait que l’on ne remarquait qu’après avoir consommé le repas.

Pistura et Fu Qingqing avaient l’air beaucoup mieux après avoir terminé leurs repas. Même leurs regards sur Cillin n’avaient plus l’air plein de ressentiment comme auparavant.

À ce stade, le jeune homme avait compris qu’il n’était pas la cause d’une grande partie de leur ressentiment.

Guan Feng discuta brièvement avec ses quatre disciples. Pistura, Fu Qingqing et Goryeo lui firent un bref rapport sur leur dernier statut d’entraînement et les problèmes qu’ils avaient rencontrés pendant l’entraînement. C’était tout ce qu’ils dirent, mais Guan Feng s’en fichait de toute façon. Il avait déjà clairement indiqué qu’il n’interférerait avec les souhaits de personne, même si les gardes impériaux et les gardes royaux devaient se battre un jour.

Cillin prêta attention à la façon dont ils firent leurs rapports et à l’accent mis sur ces rapports. Il ferait de même la prochaine fois qu’il ferait son rapport au Professeur Guan.

« Vous vous en sortez tous plutôt bien. » Guan Feng ne réserva pas ses éloges. « Cillin, si tu as d’autres questions, n’hésite pas à les poser. Viens me voir si tu es vraiment coincé sur un problème. Goryeo a dû te dire toutes les choses auxquelles tu dois faire attention, n’est-ce pas ? Dans ce cas, je ne les répéterai pas ici. Familiarise-toi avec tes seniors et entends-toi bien avec eux. »

Après avoir dit cela, Guan Feng partit pour le deuxième étage.

« Qu’est-ce que le professeur Guan est parti faire en haut ? » Demanda Cillin après que Guan Feng soit monté.

« Faire sa sieste de l’après-midi. »

« … »

Goryeo parlait la plupart du temps, suivi de Fu Qingqing et Pistura. Pistura conserva même un visage raide et sans expression pendant les quelques instants où il ouvrit la bouche.

Après avoir bavardé un moment, chacun quitta les lieux pour vaquer à ses occupations respectives.

« Ne devrions-nous pas dire au revoir au professeur Guan ? » Demanda Cillin.

« Il te tirera dessus pour l’avoir dérangé avec une affaire aussi insignifiante. » Déclara Goryeo avec conviction.

« Dans ce cas… dois-je m’en occuper maintenant ? » Cillin montra du doigt l’aquarium qui était maintenant rempli de pisse de chat.

« Ça va aller. Quelqu’un le changera demain. »

Cillin cessa de demander. Si personne ne se souciait des poissons, alors pourquoi le ferait-il ? C’est ainsi que le jeune homme remonta dans la voiture de Goryeo en saisissant le chat gris par la peau du cou.

Pitura et Fu Qingqing avaient déjà quitté la zone. Après avoir renvoyé Cillin dans son appartement, Goryeo laissa tomber ces paroles en partant : « N’oublie pas de demander une voiture volante à Maître Guan, de cette façon tu pourras te déplacer plus facilement sur cette planète. Ne t’inquiète pas, le professeur Guan a plein de voitures volantes. »

Cillin s’apprêta à se reposer après avoir remercié Goryeo, mais sa sonnette retentit peu de temps après qu’il se soit allongé sur le lit.

Cillin regarda le groupe de personnes sur l’écran de sécurité avant d’ouvrir la porte.

Trois hommes se tenaient devant sa maison. Il s’agissait de Gen Xingming, de Gen Xingyao et d’un homme plus âgé qui ressemblait légèrement aux deux frères. Il était probablement le frère aîné de Gen Xingming et l’homme qui devait devenir le roi à l’avenir, Gen Xingchen.

Si Gen Xingyao avait l’air calme et stable, alors Gen Xingchen imposait l’allure d’un supérieur. Même s’il n’avait pas officiellement succédé au trône de son père, il donnait cependant une impression toujours oppressante en se tenant juste debout, là, en silence.

Cillin ne se demandait pas pourquoi ils avaient pu localiser son appartement et traquer ses activités – il n’y avait aucun moyen qu’ils se soient présentés à un moment aussi parfait autrement – parce qu’ils appartenaient à la Famille Royale. Honnêtement, s’ils ne pouvaient même pas effectuer quelque chose comme ça, Cillin aurait soupçonné que la Famille Gen avait subi un déclin.

« Entrez. » Cillin invita le trio dans sa maison.

Il y avait quelques autres membres de la Famille Gen dans les environs, mais ils ne suivirent pas le trio dans l’appartement. Gen Xingchen ne leur permettrait pas de le faire même s’ils le voulaient. Il souhaitait garder secrètes les affaires internes de la Famille Gen, même vis-à-vis de ses subordonnés les plus fidèles.

Le chat gris avait les yeux fermés alors qu’il était allongé sur le lit. On aurait dit qu’il dormait, mais le fait que ses oreilles se tordent de temps en temps était la preuve qu’il savait tout ce qui se passait dans le salon.

« Je viens d’emménager, donc je n’ai rien à vous offrir. » Cillin tira quelques chaises et les invita à s’asseoir.

« Dans ce cas, entrons directement dans le vif du sujet. » Déclara Gen Xingchen.

Gen Xingming et Gen Xingyao restaient silencieux parce que leur frère aîné était dans les parages.

Gen Xingchen s’arrêta une seconde avant de se tourner pour regarder Gen Xingming. « Laisse-nous. »

« Mais pourquoi… » Gen Xingming ravala ses plaintes lorsqu’il vit le regard noir que Gen Xingchen lui lançait. Puis, il marmonna. « Le deuxième frère est là aussi, et pourtant tu m’envoies dehors… »

« Xingyao, va avec Xingming. » Déclara Gen Xingchen.

Gen Xingyao serra les poings si fort qu’ils craquèrent en réponse. Alors qu’il plissait les yeux vers Gen Xingming, ce dernier plissa les lèvres et entra dans la chambre.

Bien que Gen Xingyao soit réticent, il obéit aux ordres de Gen Xingchen et entra également dans la chambre.

« Devrions-nous parler dans le bureau ? » Demanda Cillin.

« Ça va. » Gen Xingchen examina de près les traits de Cillin, mais il ne trouva aucune trace de similitude entre lui et un membre de la famille Gen. Il déplaça ensuite son regard vers le pouce gauche de Cillin. « J’aimerais voir le symbole Fuji sur votre main. »

Cillin enleva ses gants et étendit son pouce pour que Gen Xingchen puisse mieux le voir.

Cillin lui-même était également perplexe. Pourquoi l’anneau était-il toujours en sommeil alors que le futur roi était assis juste en face de lui ?

Ce n’était pas comme si Cillin n’avait jamais soupçonné que Genya s’était retrouvé là où il était à cause d’un coup monté. Cependant, Genya ne s’était jamais plaint de quoi que ce soit et il exprimait souvent son désir de retrouver sa maison. Le dernier message de Genya ne mentionnait rien non plus au sujet de la méchanceté de la Famille Gen à son égard. Au contraire, cela avait été le rêve de toute sa vie de retourner dans la Famille Gen.

C’est pourquoi Cillin avait finalement décidé de révéler le tatouage à motif de feuille à Gen Xingyao. Il pourrait accélérer les choses de cette façon.

« C’est vraiment authentique ! » Gen Xingchen révéla également le motif en la feuille sur son poignet à Cillin.

Le motif des feuilles autour du poignet de Gen Xingchen était très similaire à celui autour du pouce de Cillin, mais il y avait encore quelques différences mineures, tout comme il n’y avait pas deux feuilles complètement identiques dans le monde entier.

« Chaque personne qui possède le symbole Fuji est étroitement liée au Roi Fuji. Par exemple, Xingming, Xingyao et moi l’avons parce que notre père est l’actuel Roi Fuji. Mais qu’en est-il de vous ? Qui êtes-vous vraiment ? »

Cillin secoua la tête. « J’ai fait une promesse à quelqu’un. Je ne révélerai pas la raison ni le propriétaire d’origine de ce symbole Fuji avant que l’anneau ne me fasse signe. »

Gen Xingchen ne fut pas surpris par sa réponse. Il avait prédit ce résultat avant de venir ici.

« À ma connaissance, la génération de mon grand-père est la seule génération qui porte un symbole Fuji comme le vôtre. Il se trouve que mon grand-père était aussi le Roi Fuji de son temps ! »